communiqué de presse

Conseil de Paris - Débat organisé sur la crise sanitaire - Discours d'Anne Hidalgo, Maire de Paris

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Seul le prononcé fait foi
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  • Marion FONTENY
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  • Anne HIDALGO

Mesdames, messieurs,

Mes chers collègues,

À l’heure où je m’adresse à vous pour introduire notre débat sur la situation sanitaire, les services de réanimation des hôpitaux publics parisiens sont encore soumis à une pression exceptionnelle.

Le courage reste de mise, mais une grande fatigue s’installe aussi au sein de notre hôpital public, ressentie par celles et ceux qui, depuis plus d’un an, tiennent à bout de bras la vie de nos proches touchés par la maladie.

Je veux de nouveau rendre hommage, au nom du Conseil de Paris, à l’ensemble du personnel soignant. Sans elles, sans eux, nous n’aurions jamais pu surmonter la première, la deuxième et, aujourd’hui, la troisième vague.

Bien avant le début de la crise, ces femmes et ces hommes alertaient déjà sur l’état de délabrement de notre hôpital public qui, pour survivre, a besoin de moyens supplémentaires. Des moyens financiers comme humains.

Sans quoi notre service public ne pourra plus assurer sa mission.

N’oublions jamais que, derrière les chiffres – le taux d’incidence, le nombre d’admissions en réanimation et la mortalité –, derrière les graphiques, derrière les courbes que nous scrutons, ce sont de vies dont nous parlons.

Des vies à sauver pour les soignantes et les soignants.

Des vies perdues pour des familles et des amis endeuillés.

Des vies abîmées pour celles et ceux qui devront supporter les séquelles d’une hospitalisation ou d’un syndrome de « Covid long ».

N’oublions pas la réalité du Covid : chaque jour, ce sont près de 300 personnes qui disparaissent dans notre pays.

Depuis le début de la pandémie, 100 000 personnes sont mortes du Covid en France.

Le non-recours aux soins et les retards de prise en charge d’un grand nombre de pathologies, du fait de la pression sur le système de santé, cumulés à la crise économique et sociale, auront produit un choc sans précédent sur l’espérance de vie des Françaises et des Français.

J’aimerais rappeler un fait indéniable : nous ne sommes pas égaux face à cette catastrophe.

C’est une réalité souvent masquée par les chiffres et, pourtant, nous la connaissons : les vies qui partent en premier sont celles des personnes les plus vulnérables.

Il y a la vulnérabilité liée à l’âge, bien sûr, mais l’épidémie s’avère de plus en plus discriminante socialement : le risque de décès est en effet multiplié par deux chez les plus défavorisés et les plus isolés.

Les victimes de cette maladie sont en majorité des hommes (et, dans une moindre mesure, des femmes) aux corps déjà abîmés par des conditions de vie difficiles, un travail éprouvant, un logement exigu.

Ces corps qui plient et souffrent de comorbidités sévères, du fait d’un moins bon accès aux soins, à la prévention des maladies chroniques, à une alimentation de qualité et à une vie saine.

Cette réalité, je la pointe du doigt avec l’ensemble des maires d’Île-de-France depuis le début de la crise : les inégalités sociales et territoriales ont une influence considérable sur la mortalité liée au Covid. Cela doit être redit.

C’est pourquoi notre politique de lutte contre le Covid, qu’il s’agisse du dépistage, de la réduction des risques ou de la vaccination, doit être particulièrement renforcée dans les quartiers prioritaires. J’y reviendrai. 

C’est pour rendre hommage à ces vies perdues, pour les rendre visibles aussi, que mon adjointe Laurence PATRICE vous soumettra le vœu relatif à la mémoire de l’épidémie de Covid-19 et de ses victimes.

Je veux saluer le travail mené par Éric AZIERE qui, lors de la précédente mandature, a animé un groupe de travail sur la mémoire du Covid. Ses conclusions nous ont été particulièrement utiles.

Nous n’oublions pas celles et ceux qui sont morts du Covid.

Et je veux avoir une pensée pour les agentes et les agents de la Ville qui ont perdu la vie et à leurs familles auxquelles j’ai pu témoigner ma tristesse de perdre de si précieux collaborateurs au service des Parisiennes et des Parisiens.

C’est pour cette raison que je souhaite répondre favorablement à la proposition du Professeur Jean-François DELFRAISSY de nouer un partenariat avec l’Institut « Covid-19 Ad memoriam » dont il est Président d’honneur avec Françoise Barré-Sinoussi, honorée en 2008 du Prix Nobel.

Il s’agira de construire un lieu de mémoire active.

Aux côtés d’universitaires, de soignants, de juristes, d’associations de victimes, de représentants de la société civile et des cultes, nous voulons analyser ce bouleversement que constitue la pandémie du Covid-19 et contribuer ainsi à l’édification d’une mémoire vivante de ses effets psychologiques, sociaux, politiques et  économiques.

Nous le devons aux victimes de cette terrible pandémie, à leurs familles, à leurs amis.

Chaque crise doit être une leçon pour l’avenir. Si elle ne l’est pas, elle est vouée à se répéter.

Pour retrouver le chemin de l’espérance, nous devons assurer à nos concitoyennes et à nos concitoyens que nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour les protéger, pour réparer, et bâtir la ville de l’après-crise.

C’est le sens de l’action menée par l’ensemble des équipes municipales depuis plus d’un an et je tiens à vous en remercier toutes et tous.

Notre action se décline aujourd’hui autour de deux axes clairs.

D’abord, permettre à un maximum de nos concitoyennes et de nos concitoyens d’être vaccinés au plus vite.

Sur ce plan, notre mobilisation, celle du service public parisien, a été totale. Elle continuera de l’être.

24 centres ont ouvert à Paris. 6 000 doses y sont administrées chaque jour. Plus de 160 000 personnes y ont été accueillies et vaccinées.

Je veux saluer le travail mené par les maires d’arrondissement et leurs équipes, les médecins et les infirmiers parisiens, les agentes et les agents de la ville.

Comme je l’ai dit, notre responsabilité est d’aller au plus près des Parisiennes et des Parisiens les plus éloignés de nos services de santé et qui présentent des risques de développer une forme grave du Covid-19.

Grâce à nos actions « d’aller vers », nous avons vacciné plus de 2 500 personnes dans les quartiers prioritaires.

Mais nous manquons de doses : les quantités de vaccins allouées par l’État restent très en-dessous de ce dont nous avons besoin pour atteindre un niveau d’immunisation collective suffisant d’ici l’été.

Cette semaine encore, nous ne pourrons réaliser qu’un peu plus de 16 000 primo-injections dans nos centres.

La vaccination en ville, via les pharmaciens et les médecins traitants, est mise à mal par les retards de livraison et la défiance grandissante envers le vaccin AstraZeneca.

À ce rythme, il nous faudrait plus d’un an pour protéger les 1,4 million de Parisiennes et de Parisiens de plus de 18 ans qui n’ont pas encore eu accès à la vaccination.

Ce n’est pas tolérable.

Nous ne pouvons attendre une « accélération » qu’on nous promet semaine après semaine et qui ne vient pas, ou trop timidement.

Il nous faut des vaccinodromes et beaucoup plus de vaccins, beaucoup plus vite. Il faut que l’on vaccine 7 jours sur 7 et jusque tard dans la nuit.

C’est ce que je ne cesse de demander au gouvernement depuis plusieurs mois.

Le gouvernement doit exiger des laboratoires qu’ils tiennent leurs engagements à l’échelle européenne et prendre, le cas échéant, les mesures qui s’imposent en matière de propriété intellectuelle pour permettre une production à grande échelle et à faible coût de formes génériques de ces vaccins.

Le deuxième axe de notre action est une politique cohérente de réduction des risques.

Si la vaccination reste le seul moyen de sortir de la crise, un principe de réalité nous oblige à penser les prochains mois qui nous y mèneront. Les efforts pour limiter le nombre de contaminations doivent être poursuivis et amplifiés.

Nous ne pouvons nous satisfaire de constater que 13 000 Parisiennes et Parisiens de tous âges soient infectés chaque semaine par ce virus.

Aujourd’hui, de plus en plus de jeunes sont infectés et, pour certains, hospitalisés.

Je n’accepterai jamais que notre jeunesse soit une génération sacrifiée.

Elle doit être accompagnée, soutenue.

Elle doit pouvoir suivre une scolarité normale.

Pour ce faire, et comme je l’ai exigé dès le 28 janvier dernier, les enseignants doivent être vaccinés au plus vite pour leur permettre d’assurer cette mission qui leur incombe : protéger notre jeunesse et préparer leur avenir.

Plus que jamais, pour penser l’après, il faut aussi imaginer des protocoles pour accompagner celles et ceux dont l’activité n’a toujours pas pu reprendre.

Je pense aux restaurateurs, aux artistes, aux acteurs du tourisme, de l’évènementiel, aux lieux de culture et de fêtes, aux organisateurs de festival.

C’est la mission que j’ai confiée à notre comité consultatif, cette démarche citoyenne et démocratique permettant à différents représentants des milieux scientifique, économique, culturel et de la société civile de mettre en commun leurs réflexions pour penser la société parisienne post-covid.

Ces réunions ont été fructueuses. Elles ont pu aboutir à trois avancées très concrètes.

 D’abord, ce comité a fait naître des partenariats uniques entre scientifiques et acteurs culturels, notamment avec la conception d’un « concert test » pour 5 000 personnes qui évaluera les conditions de reprise.

Fondée sur le dépistage des participants, avant et après l’événement, j’espère que cette expérimentation – pour laquelle nous attendons encore diverses autorisations – pourra avoir lieu dès ce printemps, comme un symbole de renaissance.

Ensuite, nous préparons un « Livre des protocoles » fondé sur une hiérarchie des risques selon le niveau de circulation du virus.

Le croisement de regards entre épidémiologistes, citoyens, entrepreneurs et physiciens spécialisés dans l’analyse de la diffusion du virus dans l’air, permet de concevoir la reprise de certaines activités économiques et sociales tout en protégeant la population.

 Enfin, les travaux du comité consultatif nous ont permis d’améliorer notre communication en direction des Parisiennes et des Parisiens pour que chacune et chacun puisse s’approprier les données épidémiologiques, comprendre les modes de transmission et faire des choix éclairés pour se protéger et protéger les autres.

Parce que notre action est et restera toujours transparente, je demanderai à la présidente du comité, Dominique Costagliola, de venir nous présenter les conclusions de ces travaux.

 Avant de conclure mon propos, je voudrais dire quelques mots sur l’impact financier de la crise, même si le cœur de notre débat du jour est avant tout sanitaire.

Au total, le coût de la crise a été évalué à plus d’un milliard d’euros pour notre ville. C’est une situation inédite.

Tous ensemble, exécutif, maires d’arrondissement, élus de tous bords politiques, nous nous battons au service de nos concitoyens en voyant les dépenses qui filent et les ressources qui se tarissent.

Ce qui se passe à Paris se déroule aussi à l’identique en Île-de-France et partout dans notre pays.

Et tout cela, dans une indifférence étonnante de la part de l’État central, dont la réaction est loin d’être à la hauteur des enjeux.

Le soutien qu’il apporte réellement aux collectivités est si loin des annonces répétées à l’envi. Pour tout dire, la relance se paye de mots.

Sur les 1,4 milliard d’euros que nous voulons investir en 2021 à Paris pour soutenir l’activité et progresser en matière de transition écologique, les crédits du plan de relance de l’Etat représentent 4 % du montant envisagé. C’est si peu.

Les collectivités doivent être le cœur de la relance pour penser l’après ou sinon, elle n’aura tout simplement pas lieu. Je porterai inlassablement ce combat auprès du gouvernement, vous pouvez me faire confiance.

Mesdames, messieurs,

Je veux terminer en revenant sur ce qui nous permet d’affronter la crise depuis plus d’un an : notre service public. Notre service public parisien a montré l’étendue de sa force, de son adaptabilité. Il a tenu bon, il a été notre plus grand atout.

Il est tout à la fois notre identité, ce qui nous constitue, et notre projet, ce vers quoi nous devrons toujours tendre pour faire vivre l’égalité, l’égalité face à la santé, l’égalité des droits, dont celui de vivre sa vie dignement.

Merci à celles et ceux qui le font vivre, merci aux maires d’arrondissement, à toute l’équipe municipale qui, aux côtés des services de l’État, protègent nos concitoyennes et nos concitoyens.



 

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communiqué de presse
13 avril 2021

Discours d'Anne Hidalgo Conseil de Paris Crise sanitaire