Déclaration d'Anne Hidalgo, Maire de Paris, suite au décès de Jacques Martial

Jacques Martial est tout d’abord un grand homme de théâtre, de cinéma et de télévision.

Inlassable défenseur des libertés fondamentales, Jacques Martial a voué sa carrière professionnelle et artistique à la lutte contre le racisme et toutes les discriminations.

Citoyen du 19ème arrondissement et de la Guadeloupe, Jacques Martial est un homme engagé dans la mémoire de l’esclavage, la valorisation de la créativité des artistes ultramarins, et la visibilité des artistes noirs à travers notamment la "Compagnie de la comédie noire", qu'il avait fondée, son interprétation inégalée du « Cahier d’un retour au pays natal » d’Aimé Césaire et son imposant travail à la présidence du Mémorial ACTe de Pointe à Pitre, de 2015 à 2020. Auparavant, Jacques Chirac l’avait nommé à la présidence de l’Établissement Public de la Villette.

Puis, en 2015, il devient le premier président du Mémorial ACTe (Centre caribéen d’expressions et de mémoire de la traite de l’esclavage), à Pointe-à-Pitre en Guadeloupe, qu’il dirige avec passion.

Jacques Martial, c’est plus de 50 ans d’une magnifique carrière :

Au théâtre, où il avait joué les plus grands auteurs classiques et contemporains : Racine, Shakespeare, Mérimée, Jules Renard, Giraudoux, Pinter, Césaire ou Koltès.

Au cinéma, où il avait travaillé avec les plus grands : Samuel Fuller, John Berry, Sam Karmann ou Robert Kramer mais avait aussi brillé dans le doublage et la post-synchronisation de grands acteurs noirs américains : Samuel L. Jackson, Ving Rhames, Denzel Washington ou Wesley Snipes.

Mais c’est la télévision qui fera entrer Jacques Martial dans le foyer et le cœur de tous les Français, avec son rôle de « Bain Marie » dans la série policière « Navarro » aux côtés de Roger Hanin.

Sa longue et prestigieuse carrière et ses engagements humanistes lui avaient valu les distinctions de chevalier de la Légion d’Honneur et d’Officier des Arts et Lettres.

À l’exemple de son aîné, l'acteur Jean-Michel Martial, ancien président du Conseil représentatif des Français d'outre-mer, ancien Conseiller du 18ème arrondissement, décédé en octobre 2019, Jacques avait rejoint mon équipe. En 2020, il était élu conseiller de Paris.

Ancré dans le 12ème arrondissement, il avait donc poursuivi son engagement comme délégué à mes côtés chargé des Outre-mer puis, en novembre 2022, il était mon adjoint chargé des Outre-mer. Combat pour plus de justice, d’égalité et d’humanité, devenant, dans toute l’histoire de la municipalité parisienne, le premier adjoint spécifiquement chargé de ces sujets.

Il avait ainsi permis de faire vivre et de porter les préoccupations des Parisiennes et des Parisiens ultramarins et l’ancrage citoyen des actions menées par un soutien aux associations, la coopération avec les nombreuses collectivités territoriales des Outre-mer, sans oublier son combat, le travail de mémoire sur l’esclavage et ses abolitions et surtout de la visibilité des grandes figures de l’Outre-mer dans l’espace public parisien.

Avec Jacques nous travaillions également sur le bagne des Communards de l’Ile des Pins en lien avec la commune de l’Ile des pins en Nouvelle-Calédonie. Jacques aimait décrire les Outre-mer non pas comme le Bout du monde mais comme le bout de la France. Il nous invitait à regarder et aimer l’hexagone à partir des Outre-mer fenêtres ouvertes sur les autres continents, sur le monde.

Cet infatigable travailleur avait su rendre possible de nombreuses et belles initiatives, telles que la création du jardin et la statue Solitude, 1ère représentation d’une femme noire identifiée dans l’espace public parisien, ou bien la dénomination du jardin Toussaint Louverture dans le 20ème arrondissement et plus récemment la statue de Paulette Nardal, rue de la Chapelle.

Il avait également œuvré à faire vivre le carnaval tropical et en 2023, à la mise en place d’une édition de Paris Plages dédiée à la Polynésie. En 2024, Jacques a été à l’origine d’une « Nuit Blanche Outre-mer », impliquant pour la première fois les territoires ultramarins dans l’emblématique événement culturel parisien, et d’un feu d’artifice du 14 juillet aux couleurs et musiques des Outre-mer, en préambule à des Jeux Olympiques historiques dans lesquels les Outre-mer avaient été mis à l’honneur.

Ce matin, je pleure un ami cher, fidèle, généreux et sensible qui m’a beaucoup appris.

Je pense à son frère Jean-Michel lui aussi parti trop tôt et surtout à son mari Tim avec qui il formait un couple merveilleux et unique depuis tant d’années.

En ces instants si tristes, je tiens en mon nom et au nom des Parisiennes et des Parisiens à adresser à toute sa famille et à tous ses amis qui ont accompagné Jacques tout au long de sa vie si riche, toutes mes condoléances et à leur adresser tout mon soutien dans l'épreuve qu'ils traversent.

Paris, sa ville, rendra l’hommage qu’elle doit à ce grand homme de culture, citoyen engagé et humaniste au lumineux sourire.